Comment jouer la comédie sans savoir qu'on la joue ? Elles se dénonçaient d'elles-mêmes, les claires apparences ensoleillées qui composaient mon personnage () j
BREVET
pralineoscar01
Question
Comment jouer la comédie sans savoir qu'on la joue ? Elles se dénonçaient d'elles-mêmes,
les claires apparences ensoleillées qui composaient mon personnage () je me tournais vers
les grandes personnes, je leur demandais de garantir mes mérites: c'était m'enfoncer dans
l'imposture. Condamné à plaire, je me donnais des gráces qui se fanaient sur l'heure ; je
trainais partout ma fausse bonhomie*, mon importance désoeuvrée", à l'affût d'une chance
nouvelle (...).
Mon grand-père somnolait, enveloppé dans son plaid: heureusement, ses lunettes
glissaient, je me précipitais pour les ramasser. Il s'éveillait, m'enlevait dans ses bras, nous
filions notre grande scène d'amour : ce n'était plus ce que j'avais voulu. Qu'avais-je voulu?
J'oubliais tout, je faisais mon nid dans les buissons de sa barbe. J'entrais dans la cuisine, je
déclarais que je voulais secouer la salade; c'étaient des cris, des fous rires: « Non, mon chéri,
pas comme ça ! Serre bien fort ta petite main : voilà ! Marie, aidez-le ! Mais c'est qu'il fait ça
très bien ! » J'étais un faux enfant, je tenais un faux panier à salade; je sentais mes actes se
transformer en geste.
Jean-Paul Sartre, Les Mots, 1964
*gráces: qualités, talents; "bonhomie: bienveillance; "désceuvrée: inoccupée, qui s'ennuie
Grammaire et compétences linguistiques (18 points)
1°) « ce monstre qu'ils fabriquent avec leurs regrets. Absents, ils laissaient derrière eux leur
regard»: quelle est la classe grammaticale des deux mots soulignés ? (2 points)
10
15
20
Expliquer, sur le plan orthographique, pourquoi leurs regrets est au pluriel et leur regard est
au singulier (2 points)
2") De la ligne 9 à 10, relever une proposition subordonnée relative et préciser son antécédent
(2 points).
les claires apparences ensoleillées qui composaient mon personnage () je me tournais vers
les grandes personnes, je leur demandais de garantir mes mérites: c'était m'enfoncer dans
l'imposture. Condamné à plaire, je me donnais des gráces qui se fanaient sur l'heure ; je
trainais partout ma fausse bonhomie*, mon importance désoeuvrée", à l'affût d'une chance
nouvelle (...).
Mon grand-père somnolait, enveloppé dans son plaid: heureusement, ses lunettes
glissaient, je me précipitais pour les ramasser. Il s'éveillait, m'enlevait dans ses bras, nous
filions notre grande scène d'amour : ce n'était plus ce que j'avais voulu. Qu'avais-je voulu?
J'oubliais tout, je faisais mon nid dans les buissons de sa barbe. J'entrais dans la cuisine, je
déclarais que je voulais secouer la salade; c'étaient des cris, des fous rires: « Non, mon chéri,
pas comme ça ! Serre bien fort ta petite main : voilà ! Marie, aidez-le ! Mais c'est qu'il fait ça
très bien ! » J'étais un faux enfant, je tenais un faux panier à salade; je sentais mes actes se
transformer en geste.
Jean-Paul Sartre, Les Mots, 1964
*gráces: qualités, talents; "bonhomie: bienveillance; "désceuvrée: inoccupée, qui s'ennuie
Grammaire et compétences linguistiques (18 points)
1°) « ce monstre qu'ils fabriquent avec leurs regrets. Absents, ils laissaient derrière eux leur
regard»: quelle est la classe grammaticale des deux mots soulignés ? (2 points)
10
15
20
Expliquer, sur le plan orthographique, pourquoi leurs regrets est au pluriel et leur regard est
au singulier (2 points)
2") De la ligne 9 à 10, relever une proposition subordonnée relative et préciser son antécédent
(2 points).